Ana Cristina Barriendo Escuín prend soin des avocats

Ana Cristina Barriendo Escuín prend soin des avocats

De Paris à Madrid, en passant par Barcelone puis Dubaï, le parcours de l’avocat madrilène fait rêver. Aujourd’hui à la tête des ressources humaines du cabinet McDermott Will & Emery à Paris, Ana Cristina Barriendo Escuín raconte sa vision du métier, en toute transparence. Rencontre.

La transparence comme ligne directrice du cabinet. Chez McDermott, tous les bureaux sont vitrés. « Dans notre cabinet, tout est transparent, afin que tout le monde puisse se voir tous les jours. Un contact quotidien entre tous les collaborateurs, même visuel, est primordial. Les équipes sont intercalées entre elles afin de favoriser les échanges », explique Ana Cristina Barriendo Escuín, directrice recrutement, carrières et formations du cabinet d’avocats McDermott Will & Emery.

 

UN AVOCAT POUR DES AVOCATS

Après quatre années d’études de droit à l’université de Saragosse, et une année d’Erasmus à Nantes, Ana Cristina Barriendo Escuín hésite entre l’avocature et la magistrature. Elle décide alors de rester deux années supplémentaires à Nantes et d’accomplir deux stages en juridiction et deux en cabinet d’avocats. In fine, elle opte pour la robe. Après une année à Londres, elle étudie la common law, puis passe les équivalences, avec succès, pour devenir avocat en France, où elle entame sa carrière, à Paris, au sein du cabinet Clifford Chance qui crée un département franco-espagnol.

 

De là, intégrée au spanish desk, elle se partage régulièrement entre Paris, Madrid et Barcelone. Une transition familiale au MoyenOrient lui laissera le temps de réfléchir à la suite qu’elle envisage pour sa carrière. Lorsqu’elle revient chez Clifford Chance, c’est pour occuper le poste de responsable du recrutement. Comme elle connaît l’envers du décor, elle prend vite en main ce nouveau métier. Pour Ana Cristina Barriendo Escuín, le fait d’être avocat est un atout essentiel pour occuper une fonction support dans un cabinet et parce qu’« un cabinet d’avocats doit être géré par les associés». Alors un avocat au service d’autres avocats est une ressource de choix. Il connaît précisément leur métier, les évolutions qu’ils attendent, les aménagements qu’ils souhaitent.

 

 

 

Ana Cristina Barriendo,

Directrice recrutement carrières & formation,

Avocat au barreau de Madrid

 

L’HUMAIN AU CŒUR DE TOUT

L’avocat rejoint le cabinet McDermott, en 2011, année de la création de l’antenne parisienne. «Il fallait tout bâtir», retrace-t-elle. C’est plutôt réussi. Chez McDermott, une partie historique de la clientèle est japonaise. Une salle de réunion a été spécialement conçue pour s’adapter aux habitudes nippones: fauteuils en velours, table basse de travail, décoration sobre. Seule une photo de la statue du professeur Gustave Émile Boissonade vient rappeler qu’il a été conseiller juriste du ministère de la Justice au Japon.

 

Qu’il s’agisse du processus de recrutement ou de l’accompagnement des collaborateurs dans leur carrière, «chez McDermott, l’humain est au cœur de tout», souligne la DRH, en insistant sur l’identité McDermott. Au-delà d’une culture juridique pointue, elle ajoute: « Nos futurs collaborateurs doivent avoir un bon esprit d’équipe, mais également être à l’écoute des autres et faire preuve d’une grande humilité.».Chez McDermott, il faut savoir s’adapter en permanence et être à l’écoute des clients, mais également de l’évolution du monde universitaire.

 

En effet, le cabinet « accueille beaucoup de M2 dans le cadre de séminaires, d’ateliers CV, de simulations d’entretiens d’embauche». Cela a permis de renforcer les liens avec les universités et les professeurs, et de proposer une offre en phase avec la demande. «Il faut écouter les jeunes», exhorte Ana Cristina. Le cabinet compte aujourd’hui 70 avocats et 25 stagiaires en permanence. Attentif à la diversité, le cabinet recrute de nombreux profils bilingues avec des avocats franco- allemands, franco-russes, franco-espagnols, franco-italiens, franco-arabes, franco-japonais, et franco-chinois. Être diplômé de la Sorbonne, Assas ou Sciences Po n’est pas un critère. La DRH « aime écouter la pertinence du choix de la formation universitaire des candidats, qui n’est pas forcément évidente à la lecture d’un CV ».

 

L’ÉQUILIBRE ENTRE VIE PROFESSIONNELLE ET VIE PRIVÉE

Comme tout cabinet américain, McDermott se doit d’offrir un service d’excellence à sa clientèle. Toutefois, cela ne doit pas empiéter sur la vie privée des collaborateurs. « On ne peut pas être heureux dans sa vie personnelle si on ne l’est pas dans sa vie professionnelle, et inversement », insiste Ana Cristina Barriendo Escuín, en poursuivant : « Chez nous, le sport fait partie de l’hygiène de vie de nos collaborateurs. » Pilates le lundi et le mercredi. Certains des avocats du cabinet font déjà partie des équipes sportives du Palais.

 

Elle précise: « L’été, nos collaborateurs organisent régulièrement des footings sur les quais et aux Tuileries pendant la pause déjeuner. » Pour que cet équilibre soit pleinement atteint, tout est mis en œuvre afin que chaque collaborateur se concentre sur le cœur de son métier. « Nous avons pour politique de décharger nos collaborateurs de toutes leurs tâches non juridiques, grâce au travail de nos assistantes juridiques et du personnel administratif hautement qualifié. »

 

FACILITER LE DÉVELOPPEMENT DE LA CLIENTÈLE PERSONNELLE

Tout est prévu chez McDermott pour permettre aux collaborateurs de développer leur clientèle personnelle. Une salle, discrète, sans décorum, est mise à disposition des collaborateurs qui souhaitent recevoir leurs propres clients. « Cela est inhérent à l’exercice de la profession. Un avocat doit savoir dire non à un client, mais également estimer les frais d’un dossier. Nos associés conseillent nos collaborateurs sur certains de leurs dossiers personnels», explique-t-elle. Cette liberté est encouragée au sein du cabinet.

 

« Pour développer sa clientèle, il faut avoir la fibre entrepreneuriale. Cela n’est pas naturel chez tous les avocats», souligne Ana Cristina Barriendo Escuín. Impossible cependant d’estimer le nombre d’avocats qui développent leur clientèle en parallèle de leurs dossiers chez McDermott. Elle résume: « Nous ne souhaitons pas le savoir.» Indépendance oblige. De plus, les associés du cabinet encouragent vivement les collaborateurs à effectuer des actions pro bono en par ticipant à un dossier proposé par le cabinet ou bien en s’engageant dans des actions personnelles.

 

ENCOURAGER LA PARITÉ

Chez McDermott, les stagiaires et collaborateurs juniors sont essentiellement des femmes, les collaborateurs « mid level» à égalité, et les associés, comme souvent, majoritairement des hommes. En janvier, le Woman’s Summit de Miami a réuni toutes les femmes associées de McDermott monde pour récompenser la firme dans la catégorie « Best place to work as a woman ». Rang qu’elle détient sur le podium depuis plusieurs années consécutives aux États-Unis. La DRH explique : « Nous sommes en train d’établir des programmes et de prendre des initiatives pour encourager cela en Europe.» L’intégration et la progression des femmes dans leur carrière sont une priorité pour McDermott qui a développé des programmes spécifiques de coaching et de mentoring dans tous les bureaux déployés à travers le monde. Des actions spécifiques de développement clients pour et par des femmes ont été mises en œuvre en Europe et en Asie avec succès.

 

COMMENT DEVENIR ASSOCIÉ ?

Tout dépend de la personnalité de chacun. Pour devenir associé, il faut avoir une certaine appétence pour le business development, le marketing, les interactions entre les associés au sein du groupe. Ana Cristina Barriendo Escuín encourage: « Nous souhaitons grandir de manière organique, par le bas, en accompagnant nos collaborateurs en les associant. »

 

DES FONCTIONS SUPPORT EN PLEIN ESSOR

Les fonctions support prennent de l’ampleur au sein des cabinets d’avocats, les propulsant au rang de véritables firmes. La DRH confirme, que chez McDermott, « une personne est en charge du business development de l’UE et de l’Asie, basée à Paris ». En plus des formations juridiques mensuelles, le cabinet propose également des formations non juridiques en interne. D’ailleurs, comme le précise Ana Cristina Barriendo Escuín, « nous avons mis en place des ateliers bien-être, et envisageons de déployer nos formations en business development ».

 

LE CHOIX DE LA PASSION

La spécialiste du recrutement le souligne, le niveau d’anglais doit être irréprochable. Pour y parvenir, il faut effectuer des stages à l’étranger, un LL.M., passer des certifications. Une troisième langue est très appréciée par les avocats, en particulier chez McDermott. « De manière générale, il faut faire un choix passionné et raisonné, faire preuve d’un grand enthousiasme pour la matière. Le stage sert à confirmer ce choix, ou au contraire à trouver la discipline adéquate », valorise-t-elle. Trouver le job idoine ne relève donc pas seulement de la chance.

 

Pierre Allemand
@Pierre_Ald