« Pour être associé, il faut cocher plusieurs cases », Xavier de Kergommeaux, Senior Partner, Gide

« Pour être associé, il faut cocher plusieurs cases », Xavier de Kergommeaux, Senior Partner, Gide

Comme nombre d’avocats brillants, Xavier de Kergommeaux n’envisageait pas, jeune, d’exercer ce métier. Mais la passion du droit va le rattraper et il intégrera le cabinet Gide en 1990 auquel il est, depuis, resté fidèle. Ce spécialiste de la finance et de la titrisation a notamment dirigé le cabinet au moment de la crise financière de 2008 et en a remarquablement amorti les conséquences. Grâce à son sang-froid et sa puissance de travail, il a su réformer la structure bientôt centenaire et lui conserver la place internationale de choix qu’elle occupe aujourd’hui dans un monde extrêmement concurrentiel.

Carrières Juridiques. Avez-vous toujours souhaité être avocat ?

Xavier de Kergommeaux. Pas du tout. Fils d’avocat, j’imaginais tous les métiers sauf précisément celui de mon père. J’ai donc fait HEC – promotion 1985 – puis obtenu une équivalence vers la deuxième année de droit. Mon service militaire accompli, j’ai commencé ma carrière dans la banque Louis Dreyfus en tant que chargé de clientèle pour les grandes entreprises. J’ai vite compris qu’intellectuellement j’étais plus stimulé par les problématiques juridiques que par les aspects commerciaux. À l’époque, Jean Reinhart, un ami avocat, m’a vivement conseillé de rejoindre le cabinet Gide. J’ai suivi son conseil, intégré la firme au sein du département finance et, dès mon premier jour, me voici chargé d’un vaste dossier de titrisation qui allait enclencher ma carrière et spécialisation. Ma voie était tracée. 

 

Que retirez-vous de cette double compétence école de commerce/droit ?

Cette expérience au sein de la banque Louis Dreyfus ainsi que ma double compétence en droit et finance m’ont beaucoup aidé. Quand je suis arrivé chez Gide, je n’avais certes pas une grande expérience professionnelle en droit, mais le fait d’être passé par le secteur bancaire a facilité les relations que je pouvais entretenir avec mes clients : je parlais et comprenais leur jargon. De manière générale, une double formation est un atout considérable en termes d’ouverture d’esprit, elle est nécessaire à une bonne compréhension des problématiques corporate, financières et comptables. L’esprit entrepreneurial qu’on apprend dans les grandes écoles est très valorisable.

 

Comment s’est déroulé votre passage de la banque au monde juridique ?

Le contraste entre le fonctionnement hiérarchique d’une banque et celui d’un cabinet d’avocats est très marqué. La banque est un univers très hiérarchisé, ce qui est probablement nécessaire face aux risques liés au crédit. Mais cela ne me convenait pas, je le vivais comme quelque chose de très pesant. En revanche, dans un cabinet d’avocats, on est souvent autonome et responsable face au client. Chez Gide, j’ai immédiatement été poussé « dans le grand bain » : c’est le mode de fonctionnement du cabinet où il existe une responsabilisation très rapide des jeunes collaborateurs. Nous souhaitons les mettre en face du client le plus vite possible. La sanction du client est parfois injuste, mais elle demeure la moins injuste des normes méritocratiques.

 

Comment avez-vous vécu votre première expérience face au client ? 

J’ai pensé qu’ils étaient fous de laisser un débutant face au client, sans expérience juridique. Mais cette folie était en réalité bien contrôlée. C’était en effet la meilleure manière de progresser, car lorsque l’on sait que tout est encadré, c’est le meilleur moyen de tomber dans la médiocrité. On s’implique davantage lorsque l’on a le lead sur un dossier : l’associé n’est sollicité que sur les points névralgiques, car on s’attache personnellement à prêter attention à ce que l’on fait. De manière générale, la progression personnelle est plus rapide dans une structure qui vous responsabilise, comme chez Gide, plutôt que dans un univers contrôlé.

 

Vous avez été associé jeune : quels sont les critères pour gagner l’association?

Il fallait cocher plusieurs cases : une compétence technique reconnue par les clients, un chiffre d’affaires conséquent, une personnalité compatible avec les valeurs du cabinet dont l’esprit d’équipe. 

 

Qu’est-ce qui vous empêche de dormir ?

Aujourd’hui, rien ne m’empêche de dormir, mais je suis très vigilant dans un contexte ultra-concurrentiel où certains de nos adversaires voudraient capter du chiffre d’affaires en débauchant nos avocats. Nous améliorons donc constamment la compétitivité RH du cabinet (déménagement, rentabilité, formation…).

 

Pierre Allemand